martes, 30 de marzo de 2010

Les nouvelles mères de la place de Mai


Les nouvelles mères de la place de Mai

Blog Solidaridad Latina |

20/03/2010

Plus de 100 000 Argentins sont dépendants du paco, une drogue à base de résidus de cocaïne. Une association de mères de famille tente de sortir les jeunes de ce cauchemar.

Nous les avons rencontrées pour la première fois en plein coeur de Buenos Aires. Elles ne sont qu'une poignée, chaque jeudi, à défiler devant le palais présidentiel, et pourtant elles se sont vite fait remarquer. Les Madres contra el paco (mères contre le paco) succèdent, sur la place de Mai, aux fameuses “mères et grand-mères de disparus” de la dictature.

Elles portent un foulard noir, en signe de deuil pour les jeunes tués par le paco, cette drogue élaborée à partir des restes du processus de production de la cocaïne, et souvent associée à des matières dangereuses comme du kerosen ou de l'acide sulfurique. Chaque jeudi, jeunes mamans et vieilles femmes se relaient pour faire le voyage depuis leur banlieue lointaine et venir crier leur colère devant le siège du pouvoir.

"Cette drogue est une peste”

Elles appellent à l'aide, tout simplement, un gouvernement qui fait le sourd. “Nous demandons une politique publique pour les victimes du paco, une prise en charge immédiate, des soins psychologiques, des formations pour leur réinsertion dans la société”, énumère Berta, la cinquantaine dynamique.

Marta Inès Rugolo, psychologue en charge de la santé mentale à l'hôpital Carlos Durand de Buenos Aires, nous explique qu'en Argentine, il n'existe pas dans les hôpitaux de service habilité à soigner les personnes dépendantes.

La thérapeute déplore d'autant plus cette absence de politique publique en matière d'addiction qu'elle reçoit chaque jour plus de victimes indirectes du paco: "Cette drogue est une peste, elle touche les enfants de plus en plus petits, dès l'âge de 8 ans, elle fait tomber des familles entières dans un cycle de violence et de destruction."

L'indifférence des autorités

Pour mieux comprendre ce que vivent les Madres contra el paco, nous avons rendu visite à certaines d'entre elles à la Matanza, une banlieue pauvre et insalubre de la capitale. En nous guidant vers sa maison, Estella Maris, 40 ans, nous recommande de prendre garde aux morceaux de verre et aux pierres coupantes qui jonchent le chemin de terre, parsemé d'herbes folles que broutent quelques chevaux.

Elle nous montre un cimetière de voitures désossées par les jeunes: "Ils revendent toutes les pièces pour se payer leurs doses. La police voit ça, c'est en plein milieu de la rue, mais personne ne réagit."

A chaque croisement, avant même que le jour s'efface, vendeurs et consommateurs de paco échangent la marchandise sous le regard impuissant de tous les voisins. Mais Estella, Norma, Cristina et Maria, entre autres madres, ont choisi de ne pas baisser les yeux ni changer de trottoir. Elles ont toutes vécu la même chose. Un père absent, en prison ou violent, un fils à la dérive qui cherche son identité et un jour, bascule dans le cycle infernal du paco.

Des vols à répétition

Norma Moreno, 43 ans, 8 enfants, toute petite femme au ton affirmé, se souvient que son fils a commencé à fumer de la marijuana à l'âge de 12 ans. Il a très vite dérivé vers la cocaïne, puis le paco. Comme la plupart des mamans, Norma s'est rendue compte de l'addiction de son fils à cause de ses vols. D'abord le téléphone portable du petit-frère, puis les bijoux des parents...

"Je ne savais plus quoi faire, je travaillais toute la journée, je ne pouvais pas le surveiller. J'ai dû le mettre à la rue plusieurs fois parce qu'il vendait toute la maison", raconte Norma. Mère célibataire, elle se souvient de son désarroi quand elle entendait son fils "hurler, la nuit, quand le paco lui faisait faire des cauchemars".

Maria Guiyerba, dont le fils de 20 ans se drogue depuis 3 ans, la coupe: "Toi aussi? Et les convulsions parce qu'il ne dort plus, il en a fait, aussi?". Cette jeune femme aux yeux humides n'a rejoint le groupe que depuis 2 semaines. Comme les autres, c'est avant tout un soutien qu'elle est venue chercher. Elle raconte l'incompréhension des proches, le mépris de la police, et même de l'hôpital local qui rejette leurs gosses à la rue sitôt l'urgence passée et pour qui "quand il y en a un qui meure, c'est toujours un de moins ".

Lueurs d'espoir

Estella, le visage entouré de mèches décolorées, fume cigarette sur cigarette en les écoutant. Lorsqu'elle raconte l'histoire de son fils Esteban, aujourd’hui en cure, les visages s'éclairent. Grâce aux Madres contra el paco, qui sont arrivées en force au centre public de prise en charge des personnes dépendantes pour le faire admettre, il est aujourd’hui soigné, voit un psychologue et un psychiatre.

La grande peur d'Estella: le retour à la Matanza, où, elle le sait, son fils aura du mal à trouver un emploi et à fuir le paco. Pour l'heure, il représente un exemple que la jeune femme cite aux jeunes qu'elle rencontre dans la rue.

Les mères ne dénoncent pas les petits vendeurs, "qui sont les fils de nos voisines", ne jugent pas, elles aident les gamins du quartier à prendre conscience de leur dépendance et à faire appel à elles.

"L'autre jour, un jeune garçon est venu à la réunion", se félicite Estella. En allant chercher sa fille à l'école, Norma accoste un jeune homme qui achète sa dose: "Tu m'as menti l'autre jour, tu m'as dit que c'était fini!". Il grommelle "promis, la semaine prochaine, j'arrête". Norma n'insiste pas, elle sait que le message finira par passer.

http://www.youphil.com/fr/article/01766-les-nouvelles-meres-de-la-place-de-mai?ypcli=ano


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